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représentation de son auteur dans nos collections nationales de peinture contemporaine, et constitue comme une manière de testament de La Fresnaye. Si le Musée possédait, en effet, des œuvres de jeunesse fort intéressantes de l'artiste et d'admirables spécimens de sa manière cézanienne (le Cuirassier, la Vue de Meulan); s'il était riche également en peintures, gouaches, aquarelles de la fin de sa vie si brève (Guynemer, Portrait de Gampert, le Malade), il lui manquait un témoin de la période cubiste de Roger de la Fresnaye, qui donna alors le meilleur de lui-même, dans le même temps qu'il proposait, de cette esthétique internationale, une expression essentiellement française et hautement originale. Or le Quatorze Juillet appartient à son époque cubiste. Il le fait par son traitement si personnel de l'espace, qui, sans faire appel à la perspective, par la décomposition et l'agencement nouveau des plans, donne, de la
FIG. 2 -- L.-A. MOREAU : CHAMBRE DES AMIES.
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profondeur, une équivalence plus strictement picturale. Il le fait encore par son chromatisme -- un chromatisme absolument original et qui ne laisse pas d'étonner de la part d'un peintre cubiste. Si La Fresnaye emprunte, en effet, à ses camarades cette nouvelle expression de l'espace, il se sépare d'eux sur le plan de la couleur: soit que la nécessité d'inventer une nouvelle écriture des formes détournait leur esprit des recherches coloristes, soit que leur goût naturel les portait vers les tons austères, ils dédaignaient, eux, les couleurs claires et hautes; ce sont elles qu'il affectionne, lui, et qu'il utilise dans le Quatorze Juillet, comme dans toutes ses compositions cubistes, l'Artillerie, la Vie Conjugale ou la Conquête de l'Air. Paradoxe surprenant: la manière sombre de l'artiste est sa manière cézanienne, celle qui a précédé et qui a préparé son adhésion au Cubisme. Celle-ci accordée, sa palette s'éclaire, s'allège, se rafraîchit -- et les couleurs les plus pimpantes sourient dans ses compositions: la place qu'y occupent alors les drapeaux français est à elle seule symptomatique, qui mettent leur note bleue, blanche et rouge dans l'Artillerie et la Conquête de l'Air comme dans le Quatorze Juillet. Les tons chers aux Impressionnistes et ostracisés par la suite tant par Van Gogh, Gauguin et les Fauves, qui les trouvaient trop peu somptueux, que par les Nabis et par les Cubistes aux yeux de qui ils étaient trop hauts, ces tons légers et aériens, délicats et brillants, La Fresnaye les utilise et les marie à ceux, mineurs, que ses camarades chérissaient. Aussi, dans le tableau du

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